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3 questions à Jacques de Maillard

Sa thématique de recherche : les questions de polices et de sécurité publiques, abordées en tenant compte des pratiques, croyances et conceptions professionnelles des policiers et des politiques policières.

le 18 juillet 2017

Publié dans La lettre de la recherche n°36
Jacques de Maillard est enseignant-chercheur en science politique au laboratoire CESDIP. Sa thématique de recherche : les questions de polices et de sécurité publiques, abordées en tenant compte des pratiques, croyances et conceptions professionnelles des policiers et des politiques policières.Comprendre ces pratiques de façon comparée et dans une perspective internationale.
 

1/ Vous avez dirigé le projet ANR Refmanpol. Pouvez-vous exprimer "le bilan" de ce projet ?

« L’objectif de ce projet était de comprendre comment les indicateurs de performance et modes de gestion impactent les services de police (travail judiciaire, travail de voie publique), comment on suit l’activité et comment cela se répercute sur le travail entre les services. Ce travail sur les polices constituait une étude comparée avec l’Angleterre dont le modèle est traditionnellement opposé (exprimé fameusement par le modèle du « policing by consent »). Le bilan de ce projet a établi que ces indicateurs renforçaient la centralisation de la remontée des informations. Ces outils favorisent le suivi et le contrôle par les niveaux supérieurs, mais n’occupent pas toute la place et ne remplacent pas toutefois le contrôle qualitatif.
Suivi, reporting, contrôle de l’activité se trouvent renforcés, contribuant à produire un nouveau régime de performance. Soulignons cependant les conflits dans les services créés par la surcharge bureaucratique. Rappelons également les disparités dans les indicateurs : confiance et satisfaction des usagers en Angleterre. L’idée qu’on peut compter l’activité policière est mieux acceptée, notamment plus quantitativement. Un des aspects du débat est que l’on finit par ne faire que ce qui est mesurable. »
 

2/ On a beaucoup parlé des relations police-population sur ces derniers mois. Comment voyez-vous ces relations ? Notamment dans le contexte des attentats.

« On a pensé qu’une relation meilleure renaissait entre les polices et les populations après les attentats de Paris en janvier 2015. Mais cela ne s’est pas fait de façon durable. En 2016/2017, on est revenu à une situation beaucoup plus tendue, accentuée par une surcharge de travail et  au même type de relation qu’antérieurement, encore dégradé. On aime le policier qui nous protège, pas celui qui nous contraint. On distingue deux moments récents importants : le policier agressé à Viry-Chatillon en octobre 2016 et  « l’affaire Théo » en février 2017.
J’aborde ces questions de société à triple titre : en tant que chercheur dans un laboratoire spécialisé, le CESDIP, d’une part, dont les résultats de recherche contribuent au débat concernant la confiance de la population en la police ; en tant qu’expert sollicité par les médias, d’autre part, pour commenter les événements ; enfin en tant qu’expert engagé qui peut fournir des recommandations. J’ai notamment co-rédigé le rapport Terra Nova intitulé Police et population : pour des relations de confiance qui contient 23 propositions liées au recrutement, au management et à la formation, par exemple. Je participe également à des colloques autour de questions de société avec l’INHESJ (Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice), comme le 4 juillet dernier, où le CESDIP co-organisait Polices et populations : perspectives internationales. Il me parait important pour les universitaires de diffuser les connaissances et de nouer des partenariats extérieurs, puisque nous faisons partie d’un ensemble. »
 

3/ Comment la police, acteur du jeu politique, doit-elle suivre et s'adapter au nouveau paysage politique en devenir ?

«  Le constat depuis de longues années est qu’il existe un malaise entre les polices et les populations. À l’échelle internationale, les polices françaises sont plutôt en retard concernant ces questions. Il faut voir comment réformer l’institution afin d’avoir de meilleures relations avec les populations, alors que le contexte du terrorisme favorise un renfermement et que les polices sont mécontentes de leur rapport tant à la population qu’à leur hiérarchie. C’est ce qui constituera le gros chantier du gouvernement actuel. Point positif : c’est l’une des ambitions fixées par le président autour de la sécurité quotidienne. Il reste donc à voir comment cela peut se mettre en musique, dans un monde professionnel échaudé par les réformes précédentes ».

« J’attache une grande importance aux publications dans des revues académiques exigeantes, mais aussi à la vulgarisation d’articles scientifiques pour des revues françaises et internationales. Je n’oublie pas l’aspect enseignement. Être enseignant-chercheur, puisque je co-dirige le Master Politiques de prévention et sécurité au sein de la faculté de droit et de science politique de l’UVSQ et que j’enseigne, c’est former des professionnels du domaine. »
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Propos recueillis par Annelise Gounon-Pesquet annelise.gounon-pesquet@uvsq.fr