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Trois questions à Martin Andler sur la faible représentation des filles en mathématiques au lycée

Professeur émérite de mathématiques à l’UVSQ, Martin Andler est également président de l’association Initiation pour la Science en Europe.

le 24 mai 2022

Publié le 24 mai 2022
1/ Quelles sont vos thématiques de recherche ?
« Je travaille en mathématiques dites pures ou fondamentales, c’est-à-dire sans perspectives d’application, et plus précisément sur la théorie des représentations des groupes de Lie. Ces groupes sont une manière de décrire la notion de symétrie dans l’espace, et plus précisément de symétries où les identifications peuvent varier continûment. Par exemple, quand on tourne la tête en regardant une image, le déplacement est continu et notre cerveau réajuste l’image, l’angle varie continûment. Cette thématique de recherche s’inscrit dans l’équipe Algèbre et Géométrie au Laboratoire de Mathématiques de Versailles dont je suis membre. »

2/ Selon vous, quelle est l'origine des stéréotypes liés aux maths et de la question actuelle du manque de représentation des filles dans la spécialité maths, en cette période de baccalauréat ?
« C’est une question complexe qui constitue un véritable sujet de recherche dont je ne suis pas un spécialiste. Toutefois, en tant que praticien, et comme c’est constaté dans le monde entier, il existe un grand écart d’appétence entre les filles et les garçons pour les mathématiques et dans le souhait de poursuivre les mathématiques au lycée. Ce constat est un fait statistique, et a des causes diverses.  Mais des expériences démontrent que les stéréotypes pèsent beaucoup dans la balance. On dispose d’une série de données qui montrent que dès la petite enfance, garçons et filles sont traités différemment par leurs parents dont les attentes varient selon le sexe de l’enfant. Lors de leurs études, les filles sont plutôt meilleures que les garçons et ont notamment de meilleures capacités verbales. Considérées alors comme naturellement plus fortes dans les matières littéraires, et peu aptes aux matières scientifiques à cause des stéréotypes, elles vont ainsi s’orienter au lycée en particulier, au moment où les choix se cristallisent, vers les matières dans lesquelles on les attend. En France, la récente réforme Blanquer du baccalauréat a entrainé une forte régression du nombre de filles choisissant la spécialité de Mathématiques. »

3/ Comment pourrait-on y remédier ?
« Je reste favorable à la suppression des séries de la réforme de Blanquer au lycée, mais elle a généré un très fort déséquilibre entre les lettres, qui sont le cœur du tronc commun, et les sciences qui sont presque entièrement optionnelles. Cela a entrainé une diminution d’élèves qui incluent les mathématiques dans leurs parcours, et l’impact est disproportionné sur les filles. Il est possible de redresser l’équilibre, mais le projet d’ajout des mathématiques dans le tronc commun, comme cela se profile, sera insuffisant. Le problème va bien au-delà du lycée. La France se distingue par la différence notable entre hommes et femmes dans les études supérieures. En effet, si l’on compare la proportion de femmes présentes dans une grande école française comme l’École polytechnique dans le cycle de licence et au MIT (Massachusetts Institute of Technology) au même niveau, ce sont respectivement 18% contre 48% de femmes. Ces chiffres sont significatifs. En France, l’admission se fait par concours. A contrario, au MIT, l’admission se fait sur dossier. De quoi en tirer des leçons. »
Informations complémentaires
En savoir +
Martin Andler a fondé, en 1998, l’association de promotion des mathématiques Animath, qu’il a présidée pendant 19 ans, dont il est encore vice-président aujourd’hui.
> Association Initiation pour la Science en Europe
> Laboratoire de mathématiques de Versailles (LMV)