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Le Vietnam en proie aux inondations perpétuelles

le 30 juin 2023

Publié dans la Revue UVSQ n°11

Si les effets du changement climatique paraissent évidents dans les pôles, les populations des pays d’Asie subissent elles aussi déjà de grands dommages.

Depuis 2022, le Sud-Est de l’Asie vit des canicules inédites. La chaleur ne constitue pas le seul problème. Certains pays comme le Vietnam, notamment, risquent la submersion.
Aujourd’hui, dans certaines zones du pays, comme à Ho-Chi-Minh, qui compte 20 millions d’habitants, les populations doivent adapter leur mode de vie car l’eau monte pendant que la terre descend, les tempêtes sont plus fréquentes, les précipitations plus intenses, ce qui accroît le risque d’inondations naturelles. S’ajoutent à cela des grands programmes de protection des inondations, mis en place par les dirigeants politiques de la ville.
« L’exemple le plus frappant est celui des habitants des ruelles situées en ville qui doivent faire face par eux-mêmes au changement climatique et aux politiques de lutte contre le changement climatique », explique Jean-Paul Vanderlinden, enseignant-chercheur en économie écologique et études de l'environnement et directeur du laboratoire CEARC (Cultures Environnements Arctique Représentations Climat). Les politiques privilégient l’accès aux rues du centre-ville afin de ne pas nuire à l’économie ; l’eau des inondations est déviée vers ces ruelles pour éviter le centre-ville.
Quand il y a des inondations, les usines doivent rester accessibles pour les employés. À cet effet, les routes principales doivent rester praticables et sont alors surélevées au détriment des routes secondaires des communes. En conséquence, ces communes se mobilisent pour drainer ou surélever encore. Et puis, il y a la ruelle qui subit : les gens ont les pieds dans l’eau trois mois par an. Ces habitants illustrent la nécessité de s’adapter en usant de divers stratagèmes, selon leurs moyens financiers et leur niveau de vie.
Les gens les plus démunis louent des chambres dans des bidonvilles, logements non officiels, dans des bâtiments, des chambres les plus hautes possibles et doivent interagir avec l’eau.
Les gens des classes moyennes propriétaires de leur logement vont essayer de faire monter leur famille dans les étages supérieurs et sacrifient le rez-de-chaussée. Mais le rez-de-chaussée a un rôle majeur dans l’économie locale avec le commerce de proximité informel car il sert de siège d’activités (garde d’enfants, garage, vente de soupe, etc.).
Pour survivre, les habitants vont continuer à construire au-dessus afin de monter au-dessus du niveau de l’eau.
Outre les problèmes que cela entraine lors de la saison des pluies, tels que des maladies et la gestion des poubelles, cet impact du changement climatique entraine de nouvelles modalités sociales. Les gens s’organisent en quartiers et non plus en ruelles, par exemple. Plus marquant, ce sont parfois des familles entières qui sont relogées dans des immeubles au lieu des fragiles constructions en tôles au bord de l’eau, à plusieurs kilomètres des lieux familiers. Non seulement, elles sont délocalisées, mais surtout leur mode de vie passe d’un modèle horizontal à un modèle vertical, ce qui bouleverse complètement leurs habitudes.
Du côté du tissu économique, les petites entreprises qui datent d’avant les grandes entreprises modernes qui se sont installées depuis, construisent des digues avec des sacs de sable pour empêcher l’eau de monter et pouvoir rester. Leur objectif étant de préserver le tissu d’entreprises locales et de maintenir l’investissement économique.
Ces solutions temporaires et palliatives ne suffisent pas à résoudre les problèmes induits par la montée des eaux dans les quartiers les plus pauvres de la ville, qui devrait changer de visage dans les prochaines décennies. Que ce soit d’un point de vue économique, social ou culturel, la population endure déjà le changement climatique.
Informations complémentaires
Légende photo : Habitat précaire, canal Càu Bông, quartier 2, district Bình Thanh, Ho Chi Minh Ville. À noter le caractère stagnant de l'eau, reflétant les problèmes de drainage en cas de précipitations intenses.
Crédits photo : Jean-Paul Vanderlinden
Projet Rreflood : residual risk inondation*
Ce projet international orienté changement climatique est coordonné par l’université de Berkeley et implique la Californie, Taiwan, l’Allemagne, la France et le Vietnam. Ce sont les scientifiques français qui étudient le Vietnam et notamment la manière dont le risque résiduel peut être géré, une fois que les institutions sont intervenues. Malgré cela, le risque demeure, comme celui des inondations exceptionnelles auxquelles les habitants doivent faire face localement.
*The Residual Risk of Extreme Floods : A Challenge for Achieving the Sustainable Development Goals
Rappelons que le Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement (LSCE), le laboratoire Cultures Environnements Arctique Représentations Climat (CEARC) sont rattachés à l'Observatoire de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (OVSQ) et à l'Institut Pierre-Simon Laplace (IPSL).
> Revue UVSQ n°11