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Laïcité : 120 ans après la loi de 1905, une exigence républicaine que l’université fait vivre

Le 9 décembre 1905, la France adoptait une loi fondatrice dont les premières lignes — « la République assure la liberté de conscience » et « ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte » — continuent de structurer notre pacte républicain.

le 9 décembre 2025

Mis en ligne le 9 décembre 2025
Cent vingt ans plus tard, alors que les débats s’enflamment et que les interprétations se brouillent, il est nécessaire de revenir à l’esprit de ce texte et à ce qu’il signifie encore aujourd’hui pour l’université.

La laïcité ne naît pas en 1905. Elle est l’aboutissement d’un long processus historique, nourri d’héritages révolutionnaires, concordataires, juridiques et philosophiques. Dès 1789, l’article 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen protège la liberté d’opinion « même religieuse ». La séparation de 1905 parachève cette dynamique en affirmant un équilibre durable fondé sur la liberté, l’égalité et la neutralité de l’État — équilibre que l’article 1er de notre Constitution consacre à nouveau en 1958.

Contrairement à certaines affirmations contemporaines, la loi de 1905 n’est pas anticléricale. Le contexte politique de l’époque l’était parfois ; le texte, lui, garantit la liberté de conscience, le libre exercice des cultes et une séparation protectrice entre l’État et les Églises. Son objectif n’est pas d’exclure le religieux, mais de garantir l’indépendance réciproque des sphères spirituelle et civile, au service de l’émancipation de chacun.

Si la laïcité fait tant débat aujourd’hui, c’est souvent parce qu’elle est mal comprise ou instrumentalisée : transformée tour à tour en slogan identitaire, en drapeau militant ou en notion relativisée jusqu’à perdre toute consistance. Or la laïcité n’est ni une opinion ni une émotion. C’est un principe juridique structurant, qui protège simultanément la liberté de conscience, la liberté de culte, l’égalité des citoyens et la neutralité de l’État.
 

Le rôle de l’université : garantir un espace de liberté, d’égalité et de raison


L’université, service public de formation, de recherche et de diffusion du savoir, a une responsabilité particulière dans la mise en œuvre de ce principe. Elle repose sur un socle clair : liberté académique, neutralité du service public, égalité, refus des discriminations, méthode scientifique et débat raisonné.
  • Les personnels sont soumis au devoir de neutralité dans l’exercice de leurs fonctions : cette exigence garantit un service impartial, identique pour tous.
  • Les usagers bénéficient de la liberté de conscience et d’expression, mais ces libertés ne peuvent justifier des comportements qui porteraient atteinte au bon fonctionnement des enseignements, au pluralisme scientifique ou à l’ordre public.
  • La liberté académique, protégée par le Code de l’éducation, assure l’indépendance intellectuelle des enseignants-chercheurs, mais elle s’exerce toujours dans le respect de la rigueur scientifique et du cadre institutionnel.
Ces principes ne sont pas abstraits : ils permettent concrètement de faire vivre la contradiction, la libre confrontation des idées, l’examen critique et l’émancipation intellectuelle. L’université est un lieu où l’on discute du religieux comme d’un objet d’étude, jamais comme d’une vérité à imposer ou à contester au nom de convictions personnelles. Elle ne peut tolérer qu’un enseignement soit refusé au nom d’une croyance, qu’un personnel impose ses convictions, ou qu’un étudiant exige un traitement différencié. L’université est un espace universel : ouverte à tous, mais régi par des principes qui protègent chacun.
 

Tenir la ligne républicaine : fermeté, pédagogie et ouverture


À l’heure où les tensions identitaires traversent la société, l’université doit tenir fermement la ligne républicaine — sans crispation, mais avec constance. Cela implique de rappeler la règle commune, de refuser les confusions, de protéger les libertés tout en refusant les pressions. La laïcité n’interdit pas les convictions : elle garantit qu’aucune d’elles ne prime sur l’intérêt général et le fonctionnement du service public.

L’UVSQ, fidèle à sa vocation, poursuivra cette mission : celle de diffuser les principes de laïcité, d’égalité et d’universalisme républicain. Des formations, conférences et temps d’échanges seront proposés afin d’améliorer la compréhension de ce principe dans toutes ses dimensions — juridiques, historiques, sociales, humaines.

Ces actions seront construites avec l’ensemble des composantes de l’université, et ouvertes à celles et ceux qui souhaitent contribuer. La laïcité ne se décrète pas : elle s’incarne, elle se transmet, elle s’apprend et se partage.
 

Faire vivre la laïcité, c’est renforcer l’émancipation


Faire vivre la laïcité dans notre université, c’est offrir à chacun les conditions de la liberté, de l’égalité et du vivre-ensemble. C’est permettre aux savoirs de circuler librement, sans pressions ni dogmes. C’est, en somme, affirmer ce que l’université doit rester : un espace républicain, ouvert, exigeant, universel — un lieu où la liberté intellectuelle n’est possible que parce que la neutralité est garantie.

C’est ainsi, en célébrant les 120 ans de la loi de 1905, que l’université réaffirme son rôle essentiel : non seulement transmettre des connaissances, mais faire vivre les valeurs qui permettent à une société démocratique de tenir ensemble.

Raphaël MATTA - DUVIGNAU
Maître de conférences en droit public (laboratoire VIP)

Chargé de mission « Laïcité » de l’UVSQ