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Première détection de décharges électriques sur Mars

le 28 novembre 2025

Publié le 28 novembre 2025

Grâce aux microphones de Perseverance, des chercheurs viennent de découvrir que les tourbillons de poussière martiens génèrent de surprenantes décharges électriques – un indice clé pour comprendre l’atmosphère de la Planète rouge, ses tempêtes… et même le mystère du méthane.

On les pensait inoffensifs et anecdotiques : les tourbillons de poussière martiens, ou dust devils, pourraient en réalité jouer un rôle bien plus important dans la chimie et le climat de Mars. 
  • Les dust devils et tempêtes de poussière martiennes génèrent des décharges électriques, confirmées pour la première fois par l’analyse d’enregistrement sonores du microphone SuperCam du rover Perseverance.
  • Ces décharges dans l’atmosphère de Mars peuvent produire des composés hautement oxydants, potentiellement destructeurs pour les molécules organiques en surface et de nombreux composés atmosphériques.
  • Cette avancée constitue une découverte majeure, avec des impacts immédiats sur la chimie de l’atmosphère, le climat et l’habitabilité de la planète, mais aussi sur la préparation des prochaines missions robotiques et habitées martiennes.

Des décharges électriques ont été enregistrées au sein des tempêtes et des tourbillons de poussière – les dust devils – qui parcourent la surface de Mars. Captés de manière inédite par le microphone de l’instrument SuperCam embarqué sur le rover de la NASA Perseverance, ces signaux ont été analysés par une équipe de scientifiques du CNRS, de l’Université de Toulouse et de l’Observatoire de Paris – PSL au sein d’une équipe internationale. Ces décharges constituent une découverte majeure aux conséquences directes sur notre compréhension de la chimie atmosphérique, le climat, l’habitabilité de la planète et sur les futures explorations robotiques et habitées. Ces résultats paraissent dans la revue Nature, le 26 novembre 2025.

Sur Mars, les vents soulèvent en permanence des tourbillons de poussière fine. C’est au cœur de deux de ces dust devils que le microphone de l’instrument SuperCam, premier microphone opérant sur Mars, a enregistré par hasard des signaux particulièrement intenses. Les analyses menées par des scientifiques de l’Institut de recherche en astrophysique et planétologie (CNES/CNRS/Université de Toulouse) et au Laboratoire Atmosphères et observations spatiales (CNRS/Sorbonne Université/Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines) ont révélé qu’ils résultent de la signature électromagnétique et acoustique de décharges électriques, comparables aux petits chocs statiques que nous pouvons expérimenter sur Terre en touchant une poignée de porte par temps sec. Longtemps théorisée, l’existence de décharges électriques dans l’atmosphère martienne trouve sa première confirmation par observation.

Nature 26 nov 2025 Perseverance Mars

Ces phénomènes s’expliquent par le frottement des minuscules grains de poussière entre eux :  ils se chargent en électrons puis libèrent leurs charges sous forme d’arcs électriques longs de quelques centimètres accompagnés d’ondes de choc audibles. Sur Terre, l’électrification des particules de poussière est bien connue notamment dans les régions désertiques, mais elle aboutit rarement à de véritables décharges. Sur Mars, l’atmosphère ténue, majoritairement composé de dioxyde de carbone, rend ce phénomène beaucoup plus probable : la quantité de charges nécessaire à la formation d’étincelles y est beaucoup plus faible que sur Terre.

La mise en évidence de ces décharges électriques modifie en profondeur notre compréhension de la chimie atmosphérique martienne. Ces phénomènes montrent que l’atmosphère martienne peut atteindre des niveaux de charge suffisants pour accélérer la formation de composés hautement oxydants. Ces substances sont capables de détruire les molécules organiques présentes en surface ainsi que de nombreux composés atmosphériques, perturbant profondément l’équilibre photochimique de l’atmosphère. Cette découverte pourrait expliquer la disparition étonnamment rapide du méthane, un sujet de débat scientifique depuis plusieurs années.

Les charges électriques nécessaires aux décharges sont de nature à influencer le transport de la poussière sur Mars, jouant un rôle central dans le climat martien dont les processus restent largement méconnus. Elles pourraient également représenter un risque pour les équipements électroniques des missions robotiques actuelles et constituer un danger pour les potentielles futures missions habitées.

Le microphone de l’instrument SuperCam à bord du rover Perseverance de la NASA avait enregistré les tout premiers sons martiens en 2021 au lendemain de son atterrissage sur Mars. Allumé quotidiennement, il a recueilli plus de 30 heures de sons de la planète rouge : souffle du vent, bruit des pales de l’hélicoptère Ingenuity et depuis peu, des décharges électriques. Cette nouvelle observation confirme tout le potentiel de l’acoustique comme outil d’exploration planétaire.
Informations complémentaires
Bibliographie
Detection of triboelectric discharges during dust events on Mars. Baptiste Chide, Ralph D. Lorenz, Franck Montmessin, Sylvestre Maurice, Yann Parot, Ricardo Hueso, German Martinez, Alvaro Vicente-Retortillo, Xavier Jacob, Mark Lemmon, Bruno Dubois, Pierre-Yves Meslin, Claire Newman, Tanguy Bertrand, Grégoire Deprez, Daniel Toledo, Agustin Sánchez-Lavega, Agnès Cousin, Roger C. Wiens. Nature, le 26 novembre 2025.
Contacts
Baptiste Chide, Chercheur CNRS baptiste.chide@irap.omp.eu
Franck Montmessin, Chercheur CNRS franck.montmessin@latmos.ipsl.fr
Augustin Baudier, Attaché de presse CNRS + 33 1 44 96 51 26 augustin.baudier@cnrs.fr
Notes
Des scientifiques de l’Institut de mécanique des fluides de Toulouse (CNRS/Toulouse INP/Université de Toulouse), de l’Observatoire Midi-Pyrénées (CNES/CNRS/IRD/Méteo-France/Université de Toulouse), et du Laboratoire d'instrumentation et de recherche en astrophysique (CNRS/Observatoire de Paris – PSL/Sorbonne Université/Université Paris Cité) ont aussi participé à cette étude.
> Télécharger le communiqué de presse
Le Laboratoire Atmosphères, Observations spatiales (LATMOS-UVSQ/Sorbonne Université/CNRS) est rattaché à l'Observatoire de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (OVSQ) et à l'Institut Pierre Simon Laplace (IPSL).
> Source : article publié sur le site du CNRS