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Drainage des tourbières pour l’agriculture
Une équipe internationale impliquant le LSCE* a développé un modèle qui a permis d’estimer, pour la première fois, les émissions de carbone historiques dues à la conversion de tourbières naturelles en terres cultivables entre les années 850 et 2010.
Leurs résultats, publiés le 4 juin dans Science Advance, montrent que, sur cette période, 72 milliards de tonnes de carbone ont été émises par la conversion de tourbières en terres à usage agricole dans l’hémisphère nord. Ils indiquent également que seulement la moitié de ces émissions a été compensée par l’absorption continue du carbone par les tourbières restées naturelles de l’hémisphère nord.
Les tourbières sont les écosystèmes terrestres qui stockent le plus de carbone dans le monde. Dans leurs sols continuellement gorgés d’eau, les matières organiques issues des plantes ne se décomposent que partiellement et le carbone s’accumule dans les sols sur le long terme. Les tourbières naturelles influencent ainsi le climat en captant le dioxyde de carbone de l’atmosphère grâce à la photosynthèse et au piégeage le carbone organique dans les sols, représentant un tiers du stock de carbone des sols mondiaux et limitant ainsi l’effet de serre et le réchauffement de l’atmosphère. Cependant, le drainage artificiel des tourbières - pour l’agriculture, la sylviculture ou pour assainir ces milieux - aère les sols et augmente la décomposition de la matière organique et, par suite l’émission de carbone dans l’atmosphère.
Un modèle de simulation des émissions de carbone des tourbières
L’équipe de recherche a construit un modèle de simulation des sols qui intègre les processus hydriques mis en jeu dans les tourbières, et ceux liés au stockage de carbone contenu dans ces sols riches en matières organiques. C’est un des premiers modèles qui permet de simuler le fonctionnement des tourbières, leur conversion en terres cultivables et les émissions de carbone qui en résultent. Les scientifiques l’ont utilisé pour évaluer l’évolution dans le temps des émissions de carbone des terres cultivées après le drainage initial des tourbières. Si des quantités élevées de carbone peuvent être émis dans les premières années suivant le drainage, ils diminuent avec le temps passant d’un taux d’émission d’environ 20 tonnes de carbone par hectare et par an dans les sept premières années à 5 tonnes de carbone par hectare et par an au bout de vingt-cinq ans environ. Cette réduction s’explique par la diminution du stock de matières organiques disponibles dans les sols.
[1] Laboratoires de recherche ayant participé à l’étude :
- Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (CNRS/CEA/UVSQ),
- Mathématiques et informatique appliquéesParis (AgroParisTech/INRAE/Université Paris-Saclay),
- Laboratoire de géologie de l'Ecole normale supérieure (CNRS/ENS Paris/Université ParisSaclay),
- Ecosys (Agroparistech/INRAE/Université Paris-Saclay).
C Qiu, P. Ciais, D. Zhu, B. Guenet, S. Peng, A. M. R. Petrescu, R. Lauerwald, D. Makowski, A. V. Gallego-Sala, D. J. Charman, S. C. Brewer. Large historical carbon emissions from cultivated northern peatlands. Science Advances, 2021.
Crédits photo : Studio Barcelona
Référence
C Qiu, P. Ciais, D. Zhu, B. Guenet, S. Peng, A. M. R. Petrescu, R. Lauerwald, D. Makowski, A. V. Gallego-Sala, D. J. Charman, S. C. Brewer. Large historical carbon emissions from cultivated northern peatlands. Science Advances 04 Jun 2021:Vol. 7, no. 23, eabf1332 - DOI: 10.1126/sciadv.abf1332